dimanche 28 juin 2015

Bora Bora, 9 juin.



L'arrivée, à bord d'Air Tahiti,
en provenance de Raiatea.
Après cinq jours passés sur cette île impossible à décrire tant elle est belle, je rejoins Tahiti. Dans trois jours, ce sera le retour. Loin de moi l'idée de dénigrer l'île principale de l'archipel de la Société mais, pour moi, le rêve prend fin ici, sur ce tarmac de l'aéroport de Bora Bora, alors que j'embarque dans l'ATR 72 d'Air Tahiti, qui va m'arracher à tout jamais de cet endroit qui fait partie, avec le Grand Canyon du Colorado, Santa-Maddalena di Funes (Dolomites) et la ville de Zamosc (Pologne), des quatre lieux les plus extraordinaires que j'aie jamais vus dans ma vie.  

La vue (la claque, devrais-je dire)
depuis le terminal
aéroportuaire et maritime.
Au loin : Tahaa et Raiatea.
Avec Hiva Oa, Bora Bora aura constitué le point d'orgue de ce voyage. Je savais que ce serait le cas et je n'ai pas été déçu. Même si la circulation sur les 32 kilomètres du pourtour de l'île est devenue, à certains endroits, infernale et même si la route (flambant neuve en 82) est parfois réduite à l'état de piste de brousse, et même si l'offre hôtelière (4 établissements en 82, 18 aujourd'hui) est démesurée en regard de la surface restreinte de la "perle du Pacific". 

La vue, depuis le Motu Piti.
De tout cela, j'ai fait abstraction, délaissant le mauvais côté de l'île au profit de ce qui m'avait enchanté il y a 33 ans. Sur ce plan-là, rien n'a changé! Ce lagon est toujours aussi beau, même plus encore vu de l'intérieur. Jadis j'avais séjourné deux jours ici et m'était contenté de demeurer sur l'île. Cette année, j'ai passé une journée entière sur l'eau. Et je n'en suis pas encore remis, tant l'expérience s'est révélée exceptionnelle. 

A gauche, le Mont Otemanu,
point culminant de l'île
(727 mètres)
Raie pastenague.
Naviguer sur ces eaux aux innombrables nuances de bleu et de vert, nager en compagnie des Raies pastenagues et manta, des Requins pointes noires et citron, nourrir les poissons irisés des jardins de corail, pique-niquer sur un motu (petite île située dans le lagon, proche du récif), tout cela a constitué un enchantement similaire au vol effectué à bord de l'avion de l'aéroclub Jacques Brel d'Hiva Oa...

L'église de Faanui.
Et puis, sur terre cette fois, il y eut les retrouvailles avec les canons défendant la seule passe permettant l'accès au lagon. Posés là en 1942 par les Marines américains, ils y trônent toujours. L'escalade pour les rejoindre fut une performance physique bien plus pénible qu'en 82. Autre voie d'accès, plus pentue, plus ardue, plus longue, avec une genou pas au top et vingt kilos de plus. 


L'un des deux canons
américains de 75 mm. 
Tous 

deux pointent en direction de
la passe de Teavanui,
seule ouverture pratiquée
dans le récif de Bora Bora.
Et le second, planté 15 mètres
plus loin. Celui-ci pointe 
en direction du Motu Tapu, 
(sud de la passe), alors que
l'autre a son fût dirigé vers
le nord.
Mais je voulais les revoir. Et revoir le bunker érigé entre les deux. Il est toujours là, mais il a été repeint et les lettres que j'avais gravées sur l'un de se murs ont disparu. En 82, j'étais parti en Polynésie pour deux raisons : voir la tombe de Jacques Brel, et fuir à l'autre bout du monde, suite à une peine de coeur; et je n'ai pas retrouvé les initiales, sur les murs de ce bunker, de celle qui en était la cause...

La plage de la pointe Matira,
vue depuis mon fare
 Bora Bora, paradis sur terre? Sans aucun doute, mais paradis temporaire, le temps de quelques jours de vacances. Parce que la vie ici est somme toute spartiate et excessivement chère. Mon hôtel, certes situé sur la plus belle plage de l'île, était un 2 étoiles (bungalow de 39 m2, sans clim, sans télé ni wifi digne de ce nom) à 256 euros la nuit. Les 4 et 5 étoiles affichent des prix entre 500 et 3300 euros la nuitée (Fours Seasons Resort - bungalow sur pilotis). Un repas dans un modeste (mais bon) restaurant coûte 30 euros (plat, dessert, café), un coca 4 euros. Mêmes les supermarchés sont hors de prix, mais cela s'explique par le fait que l'île, à part le poissons et quelques fruits, ne produit rien. Tout vient par bateau. Et puis, le pire du pire pour moi, il n'y a pas la moindre salle de cinéma à 250 km à la ronde...



Le "Wind Spirit", vu d'abord à Raiatea, puis à Bora Bora.

Frangipanier rouge, dont le parfum est aussi envoûtant
que les couleurs...
Le jaune possède exactement les mêmes qualités.

Sterne huppée.


Gygis (ou sternes) blanches, magnifiques et d'un blanc
immaculé...
Un joli petit oiseau qu'on voit sur toutes les îles, y compris 
les Marquises, la Géopélie zébrée...

La plage de la pointe Matira, au coucher du soleil.

Sunset, saisi depuis Faanui.
Un autre, pris depuis la Pointe Matira...

... et le même, 25 minutes plus tard.



vendredi 26 juin 2015

Tahaa, l'île de la vanille


En route pour Tahaa. en arrière-
plan, Raiatea
Le 3 juin, par une météo superbe, j'ai l'occasion de passer la journée autour et sur l'île de Tahaa, voisine de Raiatea dont elle partage le même lagon. Plus petite, plus sauvage et moins habitée, Tahaa se distingue de sa grande soeur par ses plantations de vanille, dont on dit qu'elle est la meilleure du monde. 


L'église de Tiva
L'excursion a lieu en bateau et comprend les activités typiques des îles, à savoir plongée en eau peu profonde, afin de nager et d'admirer les poissons exotiques, requins "pointes noires" et raies pastenagues. Malheureusement, je décide de renoncer à cela car une de mes nombreuses piqûres de moustiques a fort mauvaise mine et je tiens à la garder au sec, car elle est recouverte d'une pommade que m'a donné Marie-Claude, ma logeuse à Opoa, laquelle s'y connait pour avoir longtemps travaillé dans le domaine médical. Dommage. Je ne le sais pas encore, mais je me rattraperai à Bora Bora...


De la côte ouest de Tahaa,
Bora Bora se trouve à
moins de 20 kilomètres
Nous faisons le tour de l'île et visitons tout d'abord une ferme perlière. La perle noire de Tahiti est réputée dans le monde entier et sa culture est pratiquée dans presque tous les lagons. Les plus belles sont classées par taille (8-18mm) et leurs teintes sont au nombre de 17, allant du blanc au gris très foncé. 

La ferme perlière
Sur un collier, l'alignement de perles de même taille, oscillant entre différentes teintes aux nuances gris foncé, bleu et vert, par exemple, est pour moi quelque chose de magnifique, mais le prix (€) qu'atteint une telle splendeur s'affiche à hauteur de six chiffres minimum... 



Le seul hôtel de luxe de l'île,
le Tahaa Private Island & Spa
Passons rapidement du superflu à une huile miracle et aux saveurs du palais. En Polynésie, chacun vante les bienfaits de l'huile de tamanu. Très utilisée en cosmétique, à l'état naturel et extraite d'une pression à froid des noix du même nom, l'huile "miraculeuse" (c'est ainsi que beaucoup d'autochtones l'appellent) est utilisée pour soigner tous les problèmes de peau. 




Les noix de tamanu au séchage
... et à la pression
à froid
Je l'ai personnellement testée sur mes avant-bras dont la peau, avec l'âge, est devenue très fragile : le moindre choc fait apparaître une tache rouge (sang juste sous la première peau) et met en principe plusieurs semaines pour complètement disparaître. Avec l'huile de tamanu, la tache a disparu en moins d'une semaine. Ses vertus sont, paraît-il, indéniables dans le traitement (entre autres) de l'acné et des "fesses rouges des bébés"... 



Vanille fraîchement
récoltée
A Tahaa, cette excursion m'a aussi permis de visiter une ferme consacrée à la culture des noix de tamanu et de la vanille. Cette dernière est une spécialité quasi exclusive de l'île, mais Raiatea en produit de plus en plus. Comme il faisait grand beau, des dizaines de milliers de gousses séchaient au soleil. Je vous laisse imaginer le parfum flottant dans l'air, encore accentué par l'absence totale de vent. Divin! Différente de la célèbre Bourbon, qu'on trouve dans l'océan indien, les spécialistes lui accordent une saveur supérieure, raison pour laquelle son prix est plus élevé. 


... et au séchage.
Ne manque que le parfum!
Une visite détaillée et passionnante de la ferme m'a permis d'apprendre que, en perte de vitesse dans les années 2000 par rapport à la vanille synthétique, le bio et le retour de plus en plus marqué du consommateur aux produits naturels, permet aux producteurs de l'île d'envisager l'avenir plus sereinement. Ca me rassure, car ici le travail est exécuté de A à Z, de la plantation au conditionnement, prêt à la vente... 



Raie pastenague

Requin "pointe noire"

Jeunes noix de coco

Une plante dont j'ignore le nom mais courante dans les îles

Tahaa, en vol pour Bora Bora


mercredi 24 juin 2015



Raiatea, 4 juin.


Raiatea et sa soeur Tahaa, font partie du même lagon. Elles sont les deux seules îles que je ne connaissais pas par rapport à mon voyage de 1982. Et bien cette découverte fut une des plus belles surprises de ce périple. Raiatea est la plus grande des deux (pourtour : 100 km) et la plus habitée. Elle possède les mêmes caractéristiques que les autres îles de l'archipel, à savoir un relief tourmenté, sauvage, à la végétation luxuriante, ainsi qu'un lagon diapré du plus bel effet.


Mais elle a un avantage par rapport aux "vedettes que sont Moorea et Bora Bora" : les hôtels de luxe y sont rares et, par conséquent, les touristes bien moins nombreux... Inconvénient, par contre, tout est concentré dans sa "capitale" Uturoa (banques, boutiques, restaurants, agences de location de voitures, etc...). Alors que ce gros village se situe au nord de l'île, mon hôtel se trouve à Opoa, sur la côte sud-est, à plus de trente kilomètres. Sans voiture, impossible de bouger car les transports publics ne sont pas encore entrés dans les moeurs de la population locale. 



Je le dis d'emblée, ce que je garderai avant tout de Raiatea, c'est le coucher de soleil phénoménal du 1er juin. Comme l'hôtel Atiapiti (très bon, fare en bord de plage) se trouve dans le sud-est de l'île, je dois parcourir 50 kilomètres afin de, plus à l'ouest, trouver l'endroit idéal pour assister au coucher de Râ. Y parvenant dans les temps, je suis surpris par une violente averse. 




Flûte, me dis-je tout haut! Si les nuages ne passent pas très vite, le spectacle risque d'être complètement raté. Conscient du problème, le Grand Souffleur (planqué au firmament) balance alors une bourrasque qui, si elle ne me décoiffe pas vraiment, creuse quelques pans d'un ciel bleu-ocre-rose dans la nue qui s'évapore avec lenteur.



La lumière est sublime, dantesque, et la pluie qui s'éloigne tend l'arc-en-ciel de tous les superlatifs. Il est 17 heures 25. Dans 10 minutes tout sera éteint. Appareil photo dans une main qui ne tremble pas (l'expérience, mesdames, l'expérience), je mitraille comme un djihadiste fou (pléonasme), bouche bée, et oeil ahuri devant l'époustouflant spectacle. Jamais je n'ai assisté à cela en 33 ans de photographie (eh oui, j'ai sérieusement commencé à pratiquer en Polynésie française, au printemps 1982.) A 17 heures 40, encore tout ému, je suis sur le chemin du retour, images en boîte, impatient de vivre ce moment précis, ici, maintenant, alors que je mets les photographies en ligne...


Le lendemain, sur le port d'Uturoa, je découvre un groupe d'oiseaux magnifiques. Ils sont une dizaine, debout sur un petit ponton de bois. Avec précaution, je m'approche; ils sont peu farouches et je parviens à demeurer à moins de cinq mètres d'eux.

D'un brun très foncé, leur tête est plus claire, avec une calotte d'un dégradé gris-blanc du plus bel effet; la parti inférieure de l'oeil est cerclée de blanc. Courts sur pattes, ils me font immédiatement penser à des Sternes. Internet me donnera l'information : ce sont des Noddis bruns et ils appartiennent effectivement à la même famille que les Sternes que l'on trouve un peu partout dans le monde. Photographiquement, j'en saisis quelques-uns en vol et remarque que, en chasse, ils pratiquent comme les Sternes, saisissant en vol le petit poisson proche de la surface de l'eau. Je reste là, au soleil pendant plus d'une heure, complètement sous le charme de ces superbes volatiles...